View in

English

Un devoir de diligence envers nos jeunes collègues

« Imaginez. Et si, vous aussi, vous participiez à la plus grande expérience scientifique du monde. Le CERN n'a pas seulement besoin de physiciens et d'ingénieurs : vous avez encore le statut d’étudiant ou venez d’avoir votre diplôme ? Vous êtes en début de carrière ou avez déjà de l’expérience ? Quel que soit votre domaine de compétence, votre prochaine expérience professionnelle pourrait bien se dérouler au CERN. Apprenez-en plus sur le CERN et faites une visite virtuelle de ce lieu de travail et d'apprentissage unique au monde. »

C'est ainsi que la page du site « CERN careers » accueille les éventuels candidats – en soulignant que le CERN est un lieu de travail et d'apprentissage incomparable, qui place les attentes à un niveau très élevé, et cela, à juste titre.

De ma période en tant que responsable du Bureau des relations CERN Alumni, je me souviens de la fierté avec laquelle d'anciens jeunes collègues du CERN, étudiants ou nouveaux diplômés, évoquaient avec passion leur expérience au Laboratoire. Ils tenaient à témoigner de la manière dont leur expérience au CERN, cet environnement incroyablement innovant, diversifié et collaboratif, a contribué à lancer leur carrière. 

Je suis convaincue que ces attentes sont dans la plupart des cas satisfaites et que les promesses sont tenues. Cependant, en 2021, 20 % des visiteurs du bureau de l'ombud avaient moins de 30 ans. J'aimerais vous faire part des principales questions et préoccupations qui les ont amenés à venir voir l’ombud. 

La première raison pour laquelle nos jeunes collègues ont fait appel à l’ombud était liée aux difficultés qu'ils rencontraient avec leur superviseur. Ils m'ont fait part de situations dans lesquelles ils souffraient d'un manque de supervision, ou d'une supervision trop légère, et d'un sentiment d'isolement alors qu'ils se retrouvaient seuls avec leurs problèmes et leurs questions. La pandémie de COVID19 n'a bien sûr fait que renforcer ce sentiment. 

Concernant toujours les problèmes avec la hiérarchie, certains jeunes ont dû faire face à des superviseurs trop exigeants, fixant des objectifs qu'ils n’étaient pas en mesure d’atteindre alors qu'ils étaient encore dans leur phase d'apprentissage, et ce, malgré tous les efforts déployés pour donner le meilleur d'eux-mêmes. Dans ces circonstances, le retour qu'ils ont reçu de leur superviseur n'a pas été toujours respectueux et constructif. 

S’agissant plus particulièrement des femmes, certaines ont souffert de diverses formes de sexisme, allant de commentaires faits régulièrement sur leur façon de s'habiller à des situations perçues comme harcèlement sexuel. 

Dans certains cas, les jeunes qui rencontraient des problèmes avec leur superviseur étaient des doctorants qui ont consacré trois à quatre ans de leur vie à leur thèse de doctorat, dont la réussite dépendait d'une seule personne : ils se sentaient impuissants face à ces problèmes de supervision, et très vulnérables. 

Nombre de ces jeunes collaborateurs avaient tenté d'alerter leur hiérarchie sur les difficultés qu'ils rencontraient, mais cela n'avait rien donné. En tant qu'ombud du CERN, j'ai exploré avec eux les options dont ils disposaient pour aller de l'avant et je les ai aidés dans certaines démarches, par exemple en préparant avec eux une conversation avec leur superviseur.

En parlant avec ces jeunes collègues des situations difficiles qu'ils rencontraient, je me suis rappelée à quel point je m'étais sentie moi-même vulnérable et mal outillée au début de ma carrière face à des difficultés similaires.  

Je profite aujourd'hui de chaque occasion pour inviter les superviseurs et les managers à prendre du recul et à se souvenir de ce que l'on pouvait ressentir au début de sa carrière face à un sentiment d'absence de communication, de manque de supervision ou de leadership agressif. 

Avec des agendas de plus en plus chargés, et nombre de délais à respecter et de résultats à obtenir, nos managers gardent-il toujours en tête qu'on attend aussi d'eux qu'ils soient des modèles et qu'ils incarnent les valeurs du CERN ? 

J'ai noté un point commun parmi tous les jeunes collègues qui sont venus me voir : le décalage entre l'image qu'ils avaient du Laboratoire avant de venir y travailler et l'expérience qu'ils ont concrètement vécue. 

On comprendra facilement que si ces professionnels en début de carrière partent du CERN avec une mauvaise expérience, ils resteront peut-être fiers d'y avoir travaillé, mais ils auront du mal à en parler avec enthousiasme. La réputation du CERN tient en grande partie à l'expérience qu'ont vécue nos anciens collègues. 

Nous devons tous tenir les promesses que le CERN fait aux nouveaux collègues et veiller à ce qu'ils trouvent des interlocuteurs lorsqu'ils sont confrontés à des problèmes. Les superviseurs jouant un rôle essentiel dans la réussite de leur expérience professionnelle, ils doivent, avec l'aide de toute l'équipe, fournir une supervision étroite, une écoute active, de la compréhension et du soutien. 

En tant que manager ou superviseur, vous pouvez parfois avoir l'impression que vos collaborateurs attendent plus que ce que vous êtes en mesure de leur donner à un moment donné. L'ombud offre un environnement sécurisant vous permettant d'exprimer vos préoccupations. Je suis également là pour vous. 

                                        Laure Esteveny

J’attends vos réactions, n’hésitez pas à m’envoyer un message à ombud@cern.ch. De même, si vous avez des suggestions de sujets que vous aimeriez voir traiter, n’hésitez pas non plus à m’en proposer. 

NB : pour recevoir les publications, actualités et autres communications de l’ombud du CERN, inscrivez-vous à l’adresse suivante CERN Ombud news