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Résolution de conflit : définissez vos besoins correctement

Francisco* : « J’éprouve un sentiment de frustration car les services de piquet ne sont pas répartis convenablement dans l’équipe. Sur 12 personnes, seules six, dont moi-même, effectuent régulièrement des tours de garde, les autres s’en tirent toujours avec diverses excuses. Le système de volontariat ne fonctionne pas, il faudrait mettre en place une autre politique. J’ai souvent soulevé ce point lors de nos réunions hebdomadaires, mais personne ne m’écoute. J’ai donc décidé de me retirer de la liste des volontaires. »

Régulièrement, mes visiteurs disent avoir de la peine à faire valoir leurs demandes auprès de leur superviseur ou de leurs collègues, malgré plusieurs tentatives. Cela pourrait être lié au fait que leur demande est trop vague, irréaliste, négative ou unilatérale.

Il n’est donc pas étonnant qu’avec ce point de départ Francisco n’aboutisse à rien de concret, voire rencontre des résistances. À ce stade, sa demande est en effet générale (plus d’égalité), peu réaliste (changement de politique à court terme), négative (je ne suis plus volontaire) et fermée (j’ai décidé). C’est une position fragile qui permet difficilement un débat fructueux au sein de l’équipe. Comment transformer cette approche en une proposition ayant des chances d’aboutir ?

Au cours de notre échange, Francisco maintient son objectif mais le précise : il souhaite une répartition plus équitable des services de piquet. Il est en effet conscient que les situations individuelles sont différentes. Par exemple Marcel*, qui est dans la même situation familiale, géographique et physique que lui, n’a jamais été volontaire. Michael*, quant à lui, a fait plusieurs années de permanence, bien qu’il ait des ennuis de santé. Francisco réalise qu’un changement de politique prend du temps, et qu’il doit trouver une solution plus pragmatique et plus rapide. Il propose donc d’introduire un système de critères objectifs pour inclure ou non les collègues dans la liste des services de piquet. En fin de discussion, il admet qu’il est ouvert à d’autres suggestions, pour autant qu’elles contribuent à plus d’équité. En reconsidérant son besoin de façon différente, Francisco se sent beaucoup plus confiant pour remettre le sujet sur la table lors d’une prochaine réunion.

Quelques semaines plus tard, je le croise sur le parking et lui demande des nouvelles : « La discussion est bien engagée et l’échange de vues est très ouvert et constructif. Mes collègues sont intéressés par ma proposition de critères objectifs, et nous sommes en train de les définir. » En reformulant son besoin de façon plus spécifique, avec une proposition réalisable, orientée vers un objectif clair et en restant ouvert à la discussion, Francisco avait pu entamer un échange positif et fructueux, et il était en train d’atteindre son objectif, finalement au bénéfice de toute l’équipe.

*Nom d’emprunt

Pierre Gildemyn

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