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Sexisme : voir la réalité en face

« Nous ne nous sentons pas en sécurité pour faire notre travail sereinement. Il y a les sifflements sur notre passage, les remarques désobligeantes sur notre apparence, les regards lourds qui nous suivent d’un bout à l’autre de la cafétéria, les allusions grivoises quand nous nous installons à la table d’à côté. Il y a le manque de crédit accordé à nos propos, les interruptions fréquentes quand nous prenons la parole. Sans parler des propositions plus ou moins directes, jusqu’aux promesses en échange de ‘faveurs’. Et l’expression claire et univoque de notre refus semble résonner dans une autre langue. »

Pendant les quatre années de mon mandat, le quotidien de certains – en majorité des femmes – m’a été régulièrement rapporté.

Qu’est-ce qui explique la persistance de la discrimination sur la base du sexe dans les organisations, quels que soient leur type ou leur taille ? Qu’en est-il au CERN ?

« Bien sûr, le sexisme existe… mais pas chez nous ! » Pour pouvoir répondre aux questions précédentes, il faut déjà admettre l’idée qu’il puisse y avoir du sexisme : ne pas percevoir la situation à travers le prisme d’une croyance. Car ce n’est qu’une fois la possibilité admise que la voie devient libre pour aborder le problème.

« Je n’avais vraiment pas l’intention de te heurter. » Régulièrement, cette autre croyance est invoquée : il faut une intention pour parler de sexisme. Oubliez la notion d’intention, et les cas de sexisme s’avèrent bien plus nombreux que nous l’imaginons.

« Nous sommes au courant des incidents, qui nous ont été signalés, mais il s’agit seulement de cas individuels, il n’y a pas de problème systémique. » À cause d’obstacles souvent difficiles à surmonter, beaucoup de victimes de sexisme renoncent à dénoncer les faits. La tentation est alors grande de ne prendre en compte que le peu de cas rapportés, et de les considérer comme des faits isolés, sans lien entre eux.

Le sexisme ne peut se manifester au sein d’un groupe ou d’une société que si le climat s’y prête. La majorité des membres d’une communauté se laisse simplement porter par le courant : sans opinion propre, en suivant le flot. D’autres nagent résolument avec le courant. Et puis il y a ceux qui nagent à contre-courant, avec force, courage et détermination. La somme de nos comportements individuels détermine ainsi collectivement la dynamique en place. Comprendre cette dynamique est aussi important que d’expliquer les motifs derrière les actes individuels.

Aborder ce thème sensible exige de sortir de notre zone de confort. Sommes-nous vraiment disposés à le faire ? Les organisations qui font le choix d’aborder ce thème sensible acceptent de sortir de leur zone de confort. Leur Direction a répondu à la question primordiale : « Quelle priorité voulons-nous donner à la lutte contre le sexisme ? » Ce n’est qu’en se posant les bonnes questions que nous pourrons trouver les bonnes réponses. Si vous êtes victime ou témoin de sexisme ou de harcèlement sexuel, il faut en parler.

Plusieurs services de soutien sont à votre disposition, utilisez-les !

Pierre Gildemyn

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