View in

English

Les joies du retour à la nouvelle normalité

Ça y est, les gouvernements annoncent les phases du déconfinement. Quelle bonne nouvelle, enfin ! Je réfléchis un instant à toutes les sensations que je vais retrouver, y compris les moins agréables, mais je me dis que tout compte fait, rien ne vaut un retour à cette nouvelle normalité, même si cela prendra plusieurs mois.

Je redécouvrirai la joie d’écouter ma musique préférée dans ma voiture en avançant pas à pas pour traverser la ville ou la frontière. Une fois au CERN, j’éprouverai de l’embarras devant le regard intransigeant du gardien pendant que je chercherai le badge enfoui depuis longtemps au fin fond de ma serviette. Ou, les jours où je viendrai en transports en commun, je retrouverai avec bonheur le parfum capiteux de mon voisin de droite et le grésillement des écouteurs de la voisine de gauche.

Au bureau, je retrouverai finalement avec plaisir les tics, manies et bavardages de mes chers collègues qui m’irritaient tellement quand c’était « avant » ! En partant comme toujours juste à temps pour la réunion, j’aurai à nouveau une bonne excuse pour arriver en retard, après avoir tourné pendant dix minutes à la recherche de cette place de parking tant convoitée. Oubliées aussi les discussions existentielles pour arriver à un consensus âprement arraché si oui ou non nous allons ouvrir ou fermer la fenêtre, ou baisser ou lever les stores de la salle.

Mais voici déjà l’heure du déjeuner, synonyme de détente ! À la cantine, d’ici quelques mois, je réapprendrai à me hâter afin d’arriver avant les hordes de visiteurs. Je reprendrai l’habitude de côtoyer des inconnus pour accéder aux plateaux et couverts, de piétiner pour attraper mon plat ou mon petit pain, d’emprunter la longue file pour passer à la caisse que j’apercevrai au loin. J’arpenterai cinq fois le restaurant de long en large pour trouver une place, chèrement acquise. J’apprécierai les retrouvailles avec mes collègues, dans ce brouhaha de langues mélangées dont le niveau sonore m’obligera à hausser la voix. Hélas, voici à nouveau mon repas refroidi, heureusement, il n’y aura que 15 personnes devant les fours à micro-ondes !

En temps normal, l’être humain a tendance à se plaindre des multiples petits tracas de la vie quotidienne. Le déconfinement tant attendu nous rappellera lentement mais sûrement que c’est le prix modeste à payer pour avoir la chance de travailler, qui plus est dans un environnement très stimulant.  

Ne l’oublions pas quand nous serons retournés à la nouvelle vie normale.

Pierre Gildemyn

Si vous désirez réagir à mes articles, n’hésitez pas à m’envoyer un message à Ombuds@cern.ch. De même, si vous avez des suggestions de sujets que je pourrai traiter, n’hésitez pas à m’en proposer.