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Le dernier mot

Lors de situations conflictuelles, nous avons tendance à vouloir avoir le dernier mot pour prouver que nous avons raison. En fait, cette attitude s’avère souvent la mauvaise, que l'on soit face à son interlocuteur ou que l'on communique avec lui par courriel. Il est préférable au contraire de s’efforcer d’écouter l’autre pour parvenir à une bonne compréhension du problème, avant de rechercher ensemble une solution.

Est-il vraiment important d’avoir le dernier mot ? Le fait d’avoir le dernier mot peut nous donner l’impression de contrôler la situation. En réalité, cela ne fait que creuser le fossé entre nous et notre interlocuteur. Plus nous nous focalisons sur notre propre point de vue, moins nous sommes en mesure d’écouter le point de vue de l’autre, et, un peu comme le touriste qui se contente de répéter sa question plus fort au lieu d’essayer d’adapter ses mots, nous manquons l’occasion d’ajuster nos arguments en vue de parvenir à une issue plus acceptable pour les deux parties.

Le fait de vouloir avoir le dernier mot peut aussi nous amener à être agressifs avec notre interlocuteur, et à chercher à le défier plutôt qu’à comprendre nos arguments respectifs, en le laissant ainsi sur la défensive, sans lui donner la possibilité d’envisager un autre point de vue que le sien. Tant que nous restons dans cet état d’esprit, la relation prend la forme d’un rapport de force où la moindre concession revient à céder à l’autre, tandis que les préoccupations légitimes de chacun restent incomprises.

Parfois, le fait de vouloir avoir le dernier mot traduit un besoin de se justifier. Il n’est alors pas question de revenir sur sa position, même en présence de contre-arguments a priori recevables. La relation prend la forme d'une lutte d'égos occultant les arguments objectifs en jeu et ne menant finalement à aucune issue.

Prendre le temps de comprendre les intérêts liés aux différents points de vue, et travailler côte-à-côte à la résolution du problème est la clef du règlement efficace d'un conflit. En comprenant les objectifs de chacun, en examinant des solutions mutuellement profitables et en s'entendant sur des critères d'évaluation objectifs, nous pouvons unir nos efforts pour parvenir à une décision commune sur le règlement de nos différends et, ainsi, aller de l'avant.

Les conflits sont souvent enracinés dans nos propres perceptions. Comprendre la pensée de l'autre est bien plus qu’un moyen de parvenir à une fin ; c’est la clef de la résolution du problème. Reconnaître le point de vue d'une autre personne, voire admettre sa légitimité dans un contexte donné, ne signifie pas que nous y souscrivons. Cela nous permet toutefois de disposer d’informations cruciales sur nos points de convergence et de nous indiquer une voie à suivre pour régler nos différends, tout en restant fidèles à nos valeurs et en préservant nos relations.

En écoutant l'autre, nous pouvons comprendre ses perceptions, ressentir ses émotions et entendre ce qu'il tente de nous dire. Ainsi, nous lui donnons la satisfaction d'être entendu et compris. C'est seulement lorsque l’autre a le sentiment d'avoir été écouté qu'il est disposé à envisager d'autres solutions. Paradoxalement, ce n'est pas en voulant avoir le dernier mot que l'on parvient vraiment à se faire entendre...  

Sudeshna Datta Cockerill